Se rendre au théâtre entre ami(e)s ou en famille, c'est l'assurance de passer un moment de distraction unique qui permettra de se construire de jolis souvenirs en commun. C'est donc avec beaucoup d’enthousiasme que j'ai proposé à ma fille de choisir une pièce parmi celle du Festival 7.8.9 du théâtre de Nesle de Paris. Son choix s'est porté sur Bérénice 34-44. C'est parti pour un partage théâtral.
On pourra opter lors de ce Festival 7.8.9 pour du classique (Victor Hugo et Molière), du contemporain (comme Bérénice 34-44), des créations, du jeune public (avec Le voyage de la petite note chinoise et Pour une fois que l'on s'amuse, qui promet un joli moment musical), des spectacles musicaux (chant lyrique, chanson française et pop et même de la viole de gambe avec Tous les matins du monde), des "seul en scène", et même du théâtre en espagnol ! Je dois dire que je serai très curieuse de découvrir la viole de gambe, car mon fils en a fait au conservatoire.
Bérénice 34-44 est adaptée du livre de la romancière française Isabelle Stibbe publié en 2012 (prix Simone Veil en 2013) et est interprétée sur scène par la comédienne Violette Erhart.
Pierre-Olivier Scotto a découvert ce livre dès sa sortie et a été très touché par l'histoire de l’héroïne et par le roman qui se veut historique et pédagogique. Un sujet qui l'a particulièrement intéressé puisque Pierre-Olivier a été pensionnaire de la Maison de Molière durant 5 ans. Il était donc très curieux de connaître l'histoire de la Comédie-Française durant l'occupation. Pour adapter ce livre, le metteur en scène a pensé à l'une des comédiennes de son atelier Violette Erhart. Celle-ci y interprète dans un seul sur scène Bérénice ainsi que de nombreux personnages masculins et féminins.
Dans son livre, l'écrivaine Isabelle Stibbe aborde un épisode tabou de la Comédie-Française en imaginant un personnage de fiction : Bérénice Kapelouchnik, une adolescence de 15 ans durant la période de 1934 à 1944. Issue d'une famille juive, la jeune femme passionnée par le théâtre parvient, malgré l’opposition de son père, a intégré la Comédie-Française après une formation théâtrale dans la classe de Louis Jouvet. Elle y rencontre alors des personnes de renom comme Jean Gabin ou encore Jean-Louis Barrault. La vie aurait pu être merveilleuse, mais c'était sans compter la montée de l'Allemagne nazisme, de l'anti-sémitisme et de l'occupation du territoire français par les Allemands... Alors même qu'aucune loi raciale n'est encore éditée, la maison de Molière décide d'exclure les Juifs de sa troupe afin que l'institution puisse réouvrir... C'est donc une période très trouble que cette pièce nous permet de découvrir à travers cette adaptation théâtrale.
Le livre d'Isabelle Stibbe est très intéressant, car il se base sur des faits historiques qui se sont déroulés au sein de la Comédie-Française durant la deuxième guerre mondiale, tout en y incluant des personnes de fictions et d'autres bien réels.
J'étais d'autant plus impatiente d'assister à la représentation que celle-ci est mise en scène par Pierre-Olivier Scotto, lui-même auteur et comédien de Battements d'Elles.
Bérénice entre en scène : installée devant l'atelier de couture de son père, elle commence à raconter son histoire, celle de Bérénice Kapelouchnik, qui a vu le jour en 1919. On comprend rapidement que la passion du théâtre est née alors qu'elle n'était qu'une enfant, une passion si forte, si intense, si puissante qu'elle a le vif désir d'en faire son métier. Malheureusement, son père a une vision très négative des comédiennes qu'il imagine comme des femmes aux mœurs légères : non, sa fille ne sera pas une cocotte !
Seulement voilà, la jeune fille réussit le concours d'entrée au conservatoire et plutôt qu’abandonner le théâtre, elle quitte sa famille. Elle est alors prise en charge par une femme fortunée dont Bérénice prendra le pseudonyme : elle est désormais Bérénice de Lignière. Cette vie faite de spectacles est belle pour la jeune femme, mais le tonnerre gronde au loin.... L'Allemagne envahie la France, qu’adviendra-t-il de Bérénice si l'on apprend qu'elle est juive ?
Je ne vais pas vous faire languir très longtemps : c'est une pièce à découvrir absolument, et pour plusieurs raisons ! La première est son attrait historique. Même si l’écrivaine a inventé certains personnages, elle retranscrit un fait d'histoire de la Comédie-Française dérangeant. D'ailleurs durant fort longtemps, cette épisode a été laissée sous silence telle un secret de famille trop lourd à porter. Mais tous les secrets finissent tôt ou tard par émerger... Comment imaginer que la Comédie-Française, un temps fermée sous l'occupation, n'a pas hésité à rouvrir en acceptant d'évincer tous ses comédiens juifs ? Si vous souhaitez en savoir plus, il existe des ouvrages relatant ce fait historique comme celui de Marie Agnès Joubert La Comédie-Française sous l'occupation par exemple.
C'est un sujet délicat que le metteur en scène et Violette Erhart ont su adapter avec justesse pour le théâtre. Pour cela, ils ont mis en avant des éléments essentiels de l'histoire nous permettant de comprendre l'ambiance de l'époque, tout en facilitant la compréhension du public en créant sur scène les différents moments de la vie de l’héroïne : l'atelier de couture de son père, l'espace du monde du spectacle symbolisé avec l'atelier de maquillage et le paravent et le canapé qui permet à Bérénice de se confier au public. C'est ainsi qu'à travers la vie de Bérénice, on sent le drame se profiler compte tenu la politique menée par les Allemands et la politique collaborative du régime de Vichy.
Le choix de la comédienne a été très judicieux, car Violette - dont l'avenir professionnel est très prometteur si je me réfère à cette pièce - a su profondément s'imprégner de chacun de ses rôles. Parlons d'abord de cette petite Bérénice que l'on voit grandir devant nous : de la fillette à cette adolescente qui n'hésite pas à quitter sa famille pour l'amour du théâtre, jusqu'à la jeune femme rattrapée par ses origines. Certes, Bérénice n'est pas parfaite, très extrême dans sa façon de penser, mais c'est ce qui nous fait l'aimer : elle a un caractère bien trempée, mais authentique dans ses réactions, pétillante et exalté lorsqu'elle exprime son amour pour le théâtre.
Violette Erhart est Bérénice, mais elle incarne tout autant les autres personnages en sachant y mettre l'intensité et la sensibilité qu'il faut. Elle se transforme alors grâce à un petit accessoire, en modifiant son élocution et son accent, sa gestuelle... On voit naître devant nos yeux de nouveaux personnages : le père, Mme de Lignière, son époux et bien d'autre encore parfois haut en couleur qui déclenche les rires. On comprend pourquoi le metteur en scène a misé que cette comédienne pour son seul en scène. Cela sonne comme une évidence.
À la fin de la représentation, la comédienne encore dans son rôle de Bérénice était très émue par son interprétation, d'autant plus que ce jour là, l'écrivaine était présente dans la salle. Ce fut un beau moment de théâtre récompensé par une ovation du public fort mérité !
Sa passion pour le théâtre commence alors qu'elle est enfant. Elle étudie son art dans des ateliers amateurs ainsi que la danse au conservatoire. Ensuite, elle intègre le Studio International des Arts de la scène en salle de danse, théâtre et chant tout participant aux ateliers de Pierre-Olivier Scotto. Violette fonde sa compagnie Les Arts Vagabonds, afin de créer plusieurs spectacles dont Bérénice 34-44 et Tellement Cabaret.
↪ Envie de découvrir d'autres avis sur la programmation du Festival 7.8.9 ? Direction le blog Serenamente d'Elodie pour sa critique sur Oui, bon, bien et de Bénédicte du blog Princesse acidulée pour la pièce Et si Dom Juan était une femme et Les lundis d'adieux de Dr Dory.
Bérénice 34-44 au théâtre Nesle
Un moment d'histoire entre réalité et fiction
Bérénice 34-44 est une pièce jouée au théâtre de Nesle à l'occasion de la 4e édition du Festival 7.8.9 qui se déroule du 1er au 30 septembre 2018. Durant cette période, de nombreux spectacles sont proposés dont sa diversité va contenter un large public. En effet, on y retrouve des seuls en scène (dont Bérénice 34-44), des pièces d'improvisation, des comédies et également des spectacles pour le jeune public et des musicaux : 29 spectacles - presque autant de compagnies - et 72 dates durant un mois ! Autant vous dire que vous trouverez obligatoirement une date qui conviendra à votre emploi du temps.
On pourra opter lors de ce Festival 7.8.9 pour du classique (Victor Hugo et Molière), du contemporain (comme Bérénice 34-44), des créations, du jeune public (avec Le voyage de la petite note chinoise et Pour une fois que l'on s'amuse, qui promet un joli moment musical), des spectacles musicaux (chant lyrique, chanson française et pop et même de la viole de gambe avec Tous les matins du monde), des "seul en scène", et même du théâtre en espagnol ! Je dois dire que je serai très curieuse de découvrir la viole de gambe, car mon fils en a fait au conservatoire.
Bérénice 34-44
D'après l'oeuvre d'Isabelle Stibbe
Bérénice 34-44 est adaptée du livre de la romancière française Isabelle Stibbe publié en 2012 (prix Simone Veil en 2013) et est interprétée sur scène par la comédienne Violette Erhart.
Pierre-Olivier Scotto a découvert ce livre dès sa sortie et a été très touché par l'histoire de l’héroïne et par le roman qui se veut historique et pédagogique. Un sujet qui l'a particulièrement intéressé puisque Pierre-Olivier a été pensionnaire de la Maison de Molière durant 5 ans. Il était donc très curieux de connaître l'histoire de la Comédie-Française durant l'occupation. Pour adapter ce livre, le metteur en scène a pensé à l'une des comédiennes de son atelier Violette Erhart. Celle-ci y interprète dans un seul sur scène Bérénice ainsi que de nombreux personnages masculins et féminins.
Un fait historique resté longtemps tabou...
Dans son livre, l'écrivaine Isabelle Stibbe aborde un épisode tabou de la Comédie-Française en imaginant un personnage de fiction : Bérénice Kapelouchnik, une adolescence de 15 ans durant la période de 1934 à 1944. Issue d'une famille juive, la jeune femme passionnée par le théâtre parvient, malgré l’opposition de son père, a intégré la Comédie-Française après une formation théâtrale dans la classe de Louis Jouvet. Elle y rencontre alors des personnes de renom comme Jean Gabin ou encore Jean-Louis Barrault. La vie aurait pu être merveilleuse, mais c'était sans compter la montée de l'Allemagne nazisme, de l'anti-sémitisme et de l'occupation du territoire français par les Allemands... Alors même qu'aucune loi raciale n'est encore éditée, la maison de Molière décide d'exclure les Juifs de sa troupe afin que l'institution puisse réouvrir... C'est donc une période très trouble que cette pièce nous permet de découvrir à travers cette adaptation théâtrale.
Le livre d'Isabelle Stibbe est très intéressant, car il se base sur des faits historiques qui se sont déroulés au sein de la Comédie-Française durant la deuxième guerre mondiale, tout en y incluant des personnes de fictions et d'autres bien réels.
J'étais d'autant plus impatiente d'assister à la représentation que celle-ci est mise en scène par Pierre-Olivier Scotto, lui-même auteur et comédien de Battements d'Elles.
Théâtre Nesle : un lieu plein de charme
Nous nous sommes donc rendues ce dimanche au théâtre Nesle situé dans le 6eme arrondissement de Paris, dans le quartier de St Germain des-Près. Installé depuis 1978 dans un hôtel particulier du XVII, ce lieu de divertissement dispose de deux salles : La Grande salle de 75 places située dans une cave voûtée au mur de pierre apparentes et une petite salle intimiste nommée Descente aux enfers d'une capacité de 45 places.
C'est justement dans cette petite salle que je me suis dirigée avec ma fille où nous avons choisi d'occuper le premier rang dans la mesure où l'emplacement est libre.
L'entrée du Théâtre de Nesle
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La scène n'étant pas cachée par un rideau, j'ai pu observer les différents éléments du décor avant que la pièce ne commence : à gauche, un canapé spacieux est placé contre le mur à proximité d'une malle ouverte, elle-même disposée à côté d'un petit atelier de maquillage qui occupe le centre de la scène. Sur le côté droit, un paravent est recouvert de plusieurs tenues et plus en avant de la scène, une machine à coudre mécanique.
Impressions sur Bérénice 34-44
Bérénice entre en scène : installée devant l'atelier de couture de son père, elle commence à raconter son histoire, celle de Bérénice Kapelouchnik, qui a vu le jour en 1919. On comprend rapidement que la passion du théâtre est née alors qu'elle n'était qu'une enfant, une passion si forte, si intense, si puissante qu'elle a le vif désir d'en faire son métier. Malheureusement, son père a une vision très négative des comédiennes qu'il imagine comme des femmes aux mœurs légères : non, sa fille ne sera pas une cocotte !
Une pièce entre fiction et réalité
Je ne vais pas vous faire languir très longtemps : c'est une pièce à découvrir absolument, et pour plusieurs raisons ! La première est son attrait historique. Même si l’écrivaine a inventé certains personnages, elle retranscrit un fait d'histoire de la Comédie-Française dérangeant. D'ailleurs durant fort longtemps, cette épisode a été laissée sous silence telle un secret de famille trop lourd à porter. Mais tous les secrets finissent tôt ou tard par émerger... Comment imaginer que la Comédie-Française, un temps fermée sous l'occupation, n'a pas hésité à rouvrir en acceptant d'évincer tous ses comédiens juifs ? Si vous souhaitez en savoir plus, il existe des ouvrages relatant ce fait historique comme celui de Marie Agnès Joubert La Comédie-Française sous l'occupation par exemple.
Violette Erhart : une comédienne talentueuse
Le choix de la comédienne a été très judicieux, car Violette - dont l'avenir professionnel est très prometteur si je me réfère à cette pièce - a su profondément s'imprégner de chacun de ses rôles. Parlons d'abord de cette petite Bérénice que l'on voit grandir devant nous : de la fillette à cette adolescente qui n'hésite pas à quitter sa famille pour l'amour du théâtre, jusqu'à la jeune femme rattrapée par ses origines. Certes, Bérénice n'est pas parfaite, très extrême dans sa façon de penser, mais c'est ce qui nous fait l'aimer : elle a un caractère bien trempée, mais authentique dans ses réactions, pétillante et exalté lorsqu'elle exprime son amour pour le théâtre.
À la fin de la représentation, la comédienne encore dans son rôle de Bérénice était très émue par son interprétation, d'autant plus que ce jour là, l'écrivaine était présente dans la salle. Ce fut un beau moment de théâtre récompensé par une ovation du public fort mérité !
Un mot sur Violette Erhart
Sa passion pour le théâtre commence alors qu'elle est enfant. Elle étudie son art dans des ateliers amateurs ainsi que la danse au conservatoire. Ensuite, elle intègre le Studio International des Arts de la scène en salle de danse, théâtre et chant tout participant aux ateliers de Pierre-Olivier Scotto. Violette fonde sa compagnie Les Arts Vagabonds, afin de créer plusieurs spectacles dont Bérénice 34-44 et Tellement Cabaret.
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Violette Erhart |
En conclusion : Bérénice 34-44 offre un superbe moment théâtral dont l'historique permet non seulement un attrait culturel très intéressant, mais aussi un divertissement fort appréciable du fait de la justesse d’interprétation de la comédienne. Ne manquez pas la dernière représentation le 20 septembre au Festival théâtre Nesle.
↪ Vous aurez l'occasion de retrouvez la comédienne dans le spectacle musical Tellement cabaret au Théâtre La croisée des chemins jusqu'au 29 décembre.
↪ Vous aurez l'occasion de retrouvez la comédienne dans le spectacle musical Tellement cabaret au Théâtre La croisée des chemins jusqu'au 29 décembre.
↪ Envie de découvrir d'autres avis sur la programmation du Festival 7.8.9 ? Direction le blog Serenamente d'Elodie pour sa critique sur Oui, bon, bien et de Bénédicte du blog Princesse acidulée pour la pièce Et si Dom Juan était une femme et Les lundis d'adieux de Dr Dory.
Connaissiez-vous le passé de la Comédie-Française sous l'occupation ?
Qu'aimez-vous voir au théâtre ?